Site A-8 (1960 m, 46°03’17’‘_7°33’02’’)

Panorama.

Replat au dessus du barrage de Ferpècle, route allant vers le glacier du Mont Miné.

Ce lieu-dit montre que la tradition et le patois sont encore vivants dans la région d'Évolène. Au début du siècle, l'endroit s'appelait "Pyà†dóou byeùnyo (glacier) dóou Mon Miné", témoignant que le glacier était beaucoup plus avancé qu'aujourd'hui. Maintenant le lieu est appelé "Dessârza dóou Tsublìnn", car ce fut une décharge de remblais lors des travaux de construction de la Grande Dixence].

D'ici on bénéficie d'une magnifique vue dégagée sur le fond du Val d'Hérens, ainsi que sur les morphologies glaciaires et périglaciaires :

1. Sur notre gauche : pied du massif de la Dent Blanche (4357 m) avec la cabane de Bricola - actuellement propriété de la Grande Dixence (2415 m). Un grand cône de déjection descend de la Maya, avec de nombreux blocs disséminés sur la pente (chemin de Bricola) témoignant d'éboulements récents. Tout le versant au pied des falaises de Bricola ne présente plus une topographie originelle : de nombreux remaniements de la couverture morainique ont été entrepris lors des travaux de construction du barrage (remblais pour les baraquements, etc.). Les terrasses visibles sont en fait artificielles, et non typiquement glaciaires !
    
2. Au centre de la vallée : le glacier de Ferpècle avec sa langue glaciaire terminale descendant très bas. A sa base apparaît un grand massif de roches claires granitiques, ce sont des roches moutonnées polies par le mouvement du glacier. Egalement en face de nous, la tour noire du Mont Miné (2808 m) se dresse à l'intersection des glaciers de Ferpècle et du Mont Miné, qui se rejoignaient encore au début du siècle. Remarquer les moraines latérales laissées par ces deux glaciers lors de leur retrait, tapissant les flancs de cette montagne. Le glacier de droite, celui du Mont Miné, présente parfois une belle cascade de glace bleue.
    
3. Sur notre droite : pied rocheux du massif des Veisivi (patine sombre, avec de nombreuses traînées noires). Une haute moraine latérale probablement d'âge würmien le tapisse, fortement ravinée et partiellement envahie par la végétation. 300 mètres en amont du site A-8, apparaît également une petite moraine frontale.

Un peu de glaciologie...

La dernière glaciation (la quatrième au cours de l'ère Quaternaire - représentant les derniers 1.87 millions d'années) s'est déroulée dans les régions alpines entre 80'000 et 10'000 ans avant l'époque actuelle : glaciation de Würm. Les derniers grands stades de crue glaciaire (Daun, Dryas récent, etc.), datent d'environ 13'000 et 10'500 ans. Leurs traces sont encore localement visibles dans la région de Ferpècle (restes de cordons morainiques superposés, terrasses, stries glaciaires, roches moutonnées, hautes moraines latérales, etc.). Pourtant à l'époque romaine poussait ici une forêt d'arolles jusqu'à 2400 m !

Plus récemment, le "Petit Age Glaciaire" s'étendait, en Valais, entre le début du XIVème siècle et le milieu du XIXème siècle, soit approximativement jusque vers 1850 (stade maximal d'avance des glaciers valaisans = 1820), suivi de quelques fluctuations vers la fin du XIXème siècle. Les témoins de cette dernière époque de refroidissement climatique sont des moraines frontales et latérales, particulièrement bien développées à Arolla au glacier de Tsijiore Nouve. Ici au site A-8, les deux glaciers de Ferpècle et du Mont Miné se rejoignaient pour former une langue glaciaire de 800 m de large, celle-ci atteignait même l'alpage de Ferpècle (1884 m) vers 1820 !
Après les fortes avancées des années 1970-1980, la fin des années 1980 et surtout les années 1990 marquent la tendance générale du retrait des glaciers.

Depuis 1850, date à laquelle le recul des glaciers a débuté, les Alpes suisses ont vu disparaître environ 100 glaciers. Durant les 150 années qui viennent de s’écouler, les glaciers alpins ont perdu un tiers de leur étendue et la moitié de leur volume (source WWF suisse).

Malheureusement, les moraines que l'on observe aujourd'hui sont souvent composites, c'est-à-dire qu'elles sont constituées de matériaux morainiques remaniés et mélangés au cours des glaciations successives. La présence de sols et parfois de bois fossiles permet de retrouver une séquence chronologique dans la formation de ces moraines (repères chronologiques). Mais en général, la dernière glaciation a fortement érodé les dépôts plus anciens, également passablement oblitérés par le développement des sols actuels.

• Poursuivre la route serpentant sur le fond de la vallée jusqu'au "lac". Remarquer au passage, les nombreux blocs de gneiss et de granite de la Dent Blanche, parfois oxydés avec une patine brune.