L’océan devient un continent, un scénario de 200 Ma

Grâce aux reconstructions des plaques et aux informations provenant des cartes et des coupes actuelles, on peut mettre en place un scénario assez précis de ce qui se passa dans les Alpes depuis l’ouverture de l’océan alpin il y a 165 Ma.

On représente cela sur une série de coupes verticales, reconstruites dans le passé, qui montrent l’évolution géodynamique de cette région. On peut replacer ces coupes sur les reconstructions qui leur correspondent et commencer ainsi à comprendre l’évolution des Alpes en quatre dimensions (géographie et temps).

A partir de la coupe actuelle des Alpes on peut essayer de déplier les nappes et retrouver la configuration de la chaîne avant les plissements. Ce n’est pas un exercice facile, car au fur et mesure que l’on déplie les nappes, les objets commencent aussi à bouger latéralement. Il faut donc avoir un bon modèle du mouvement des plaques pour faire ces reconstructions en coupe des Alpes dans le passé.

Sur le schéma ci-dessous (modifié de Stampfli et Hochard 2009), on part de 165 Ma en haut vers le présent en bas (0 Ma). On voit comment on peut passer de l’état de départ lorsque l’océan alpin s’ouvre à 180 Ma jusqu’à la coupe actuelle de la chaîne. L’étoile représente plus ou moins la position du Val d’Hérens au cours du temps.

Note: La totalité de l’océan alpin n’est pas représenté, on a mis la distance manquante approximative.

Entre 155 et 130 Ma, la péninsule briançonnaise se détache du sud de la France et part à la dérive avec la plaque ibérique (Espagne, Portugal, Baléares, Sardaigne et Corse) formant ainsi une nouvelle plaque; en conséquence le bras de mer Valaisan-Pyrénéen s’ouvre (recon 130). La largeur de cette péninsule était de l’ordre de 150 km entre Sion et Evolène, elle a été rétrécie d’un facteur 10 pendant les plissements alpins!

A 120 Ma, l’océan alpin cesse de s’ouvrir, c’est l’océan valaisan qui prend le relai, avec maintenant un déplacement latéral sur ses deux bord, la péninsule briançonnaise partant vers l’Est (vers le fond de l’image). Ce mouvement s’arrête vers 60 Ma, tous les acteurs sont alors en place avant le rétrécissement alpin, bien visible à 50 Ma avec le début de la subduction du Briançonnais vers le sud sous la plaque africaine.

Il faudra encore 50 Ma pour faire la chaîne telle que nous la connaissons aujourd’hui.
On voit qu’entre 40 Ma et aujourd’hui, une centaine de kilomètres de croûte continentale  européenne a été subductée sous la plaque Africaine, et la lithosphère sous les Alpes atteint à la fin plus de 120 km d’épaisseur. Sous le Valais, la croûte à elle seule atteint plus de 50 km, ce surplus de matière moins dense que le manteau explique l’élévation des reliefs alpins.