FR  EN
Vous êtes ici > Un rift dans les Alpes valaisannes

Un rift dans les Alpes valaisannes

L’ouverture de l’océan alpin s’est produit au Jurassique inférieur (200 à 160 millions d’années).

Le super-continent de la Pangée a été fracturé par une série de rifts qui ont laissé des traces bien visibles dans les Alpes. Ces fractures de la lithosphère créent des escarpements de faille qui donnent naissance à des dépôts de débris, les brèches. Dans le Val d’Hérens on retrouve les brèches des deux bords du rift alpin, au Mt Dolin pour la marge sud, et autour du Pic d’Artsinol pour la marge nord. Les bords du rift vont devenir en quelques dizaines de Ma des marges continentales entre océan et continent. Ces marges vont accumuler une série sédimentaire jusqu’au début du Tertiaire (40 Ma), c’est à ce moment que les marges Valaisannes vont être tirées (subductées) sous la plaque africaine.

Lors du rifting comme illustré sur la figure, la croûte continentale va être cassée en immenses blocs, qui glissent les uns sur les autres au fur et à mesure de l’extension de la croûte et basculent (on les appelle blocs basculés). Des bassins sédimentaires se développent entre les blocs et recueillent les détritus provenant de l’érosion du bord du rift (épaulements).

Les épaulements du rift vont être soulevés de plusieurs kilomètres (cf. Vosges et Forêt Noire) à cause de l’expansion thermique provoquée par la remontée vers la surface de roches très chaudes de l’asthénosphère et qui produisent du volcanisme. Ainsi les rifts sont entourés de chaînes de montagne, comme c’est le cas pour la Mer Rouge avec des sommets à plus de 3000m, cependant ce ne sont pas des montagnes de type alpin.

La période de rifting est caractérisée par le dépôt de grandes épaisseurs de détritus sédimentaires déposés sur ces blocs basculés. Parmi ces dépôts, on a des brèches faites de blocs anguleux provenant de sédiments plus anciens arrachés aux reliefs bordant le rift . On peut aussi y trouver des petits récifs coralliens et des dépôts de gypse et de sel si le climat le permet, comme dans la Mer Rouge.

Le rift alpin se caractérise surtout par la présence de brèches (photo) du Jurassique inférieur (200-175 Ma) à éléments du Trias, qui sont les roches qui s’étaient déposées juste avant l’ouverture du rift alpin (entre 250 et 200 Ma). 

Sur le schéma,  les sédiments plus anciens (de bleu à jaune).  Les dépôts de brèches importants sont surtout trouvés dans le premier bloc proche de l’épaulement qui se soulève. Des débris plus fins iront remplir les blocs plus éloignés. Ces dépôts de brèches plus ou moins grossières se font par écoulement sur la pente des fonds marins, on appelle ces dépôts des turbidites. Dans ces coulées sédimentaires sous-marines, les éléments les plus grossiers s’arrêteront en premier, les plus fins pourront atteindre de grandes distances et recouvrir les plancher océanique en formation.

Pour en savoir plus:

 

Le Trias pré-rift est constitué à sa base de quartzites, puis de calcaire et à son sommet de dolomies (des calcaires riches en magnésium). Ces dolomies sont caractéristiques du Trias dans les Alpes, on en trouve ni avant ni après dans la série sédimentaire alpine, et on peut les reconnaître facilement à leur couleur jaunâtre et au fait qu’elles ne réagissent pas à l’acide chlorhydrique dilué comme le font les calcaires.
La photo de brèche du Mont Dolin montre des blocs de 10 à 20cm de dolomies jaunes et de calcaires gris et blancs du Trias.

 

Ce qui est exceptionnel dans le Val d’Hérens, c’est qu’on y retrouve les brèches des deux marges alpines: au Mt Dolin pour la marge sud, africaine, et autour du pic d’Artsinol pour la marge nord, européenne. Ces deux régions représentent les restes du rift jurassique au moment où l’océan alpin s’ouvrait, il y a 180 Millions d’années (Ma).
Beaucoup plus tard, lors de la collision, la marge nord de l’océan (l’Europe), est passée sous la marge sud (l’Afrique), on parle de plaque inférieure et de plaque supérieure. Les marges des continents en collision ont été soumises à bien des événements qui les ont fortement détruites. Le bord de la plaque supérieure africaine a été soulevée en passant par-dessus l’autre et a été érodée pendant des millions d’année, alors que la marge du continent européen a été enfouie à des dizaines de kilomètres, et seuls quelques fragments ont échappé à ce processus et sont maintenant visibles à la surface, justement dans le val d’Hérens.
Les brèches du Mt Dolin sont les seules de la plaque supérieure à avoir survécu à l’érosion dans les Alpes occidentales, ce qui les rend exceptionnelles; les brèches du pic d’Artsinol sont aussi assez unique, mais elles ont un équivalent transporté pendant la collision jusque dans les Préalpes Fribourgeoises et Chablaisiennes, appelé Nappe de la Brèche, justement.

NB : Si on veut comprendre ce qui s’est passé ici dans les Alpes valaisannes, on doit aussi aller voir dans les Préalpes ce qui s’y trouve. Effectivement, une grande partie des sédiments de la marge nord a été décollée de son substratum valaisan, et transportée loin vers le nord (voir ci-dessous la partie tectonique alpine). C’est un avantage, car ce transport les a préservées du métamorphisme, et ces roches sont encore riches en fossiles qui permettent de les dater, alors que c’est un problème pour les sédiments métamorphiques qui ont perdu cette information.

Lorsque l’océan s’agrandit, les épaulements du rift et les blocs basculés vont devenir des marges continentales, et en se refroidissant (en s’éloignant de la dorsale chaude) ces reliefs vont lentement passer sous le niveau de la mer et seront recouverts de sédiments marins. Comme nous le faisions remarquer, la plus grande partie de ces sédiments a disparu du Valais au sud du Rhône, mais on peut les étudier dans les Préalpes.

Après le dépôt des brèches, une série de sédiments surtout calcaires s’est déposée sur la marge nord européenne, du Jurassique moyen jusqu’au début de l’ère Tertiaire, donc pendant 130 Ma. Pendant ces 130 Ma, la marge valaisanne nord devient ce qu’on appelle une marge passive, où il ne se produit pas grand chose. Puis soudain, on voit apparaître les prémisses de la collision, avec l’arrivée de sédiments terrigènes, dérivés de l’érosion de la plaque africaine. On peut ainsi dater précisément le début du passage de la marge nord sous la marge sud pendant l’Eocène (étage Lutétien), il y a 40 Ma, comme présenté sur la figure (modifiée de Luzieux et Ferrari, 2002).

<< Précédent

Suivant >>

Imprimer le contenu de cette page
SERVICES
Evolène-Région Tourisme
+41 (0) 27 283 40 00

Place du Clos Lombard 6
1983 Evolène
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour améliorer votre expérience utilisateur et réaliser des statistiques de visites.
Lire les mentions légales ok